lundi 28 janvier 2013

Le gout des pépins de pomme - Katharina Hagena


Le gout des pépins de pomme, Katharina Hagena

Ça faisait un petit moment que je lui faisais de l’œil. La couverture douce et invitante m'a d'abord attirée, mais une fois que j'ai lu le résumé, j'ai su que j'allais aimer. Oui, j'ai aimé, je n'ai pas ADORÉ comme d'autres livres peuvent nous renverser, mais Le gout des pépins de pomme est un roman bien construit, dont on peut percevoir les odeurs et l'atmosphère comme si on y était, tant ces éléments sont décrits avec les mots justes.

Un autre roman où l'action se passe en Allemagne, mais d'un angle complètement différent. Lorsque Iris (la narratrice) se rend aux funérailles de sa grand-mère Bertha, elle est loin de se douter de ce qui l'attend. Voilà qu'en lisant le testament avec sa mère et ses deux tantes, Iris apprend qu'elle hérite de la maison familiale à Boosthaven, dans le nord du pays. À mesure que les souvenirs entourant cette maison lui reviennent, nous apprenons l'histoire de sa famille qui, non loin du réalisme magique de Garcia Marquez, a évolué dans un univers où les arbres ont un lien étroit avec les êtres, et où le poids de la génétique prend une place de premier plan.

Même si la traduction est parfois maladroite, j'ai trouvé que les mots étaient généralement bien choisis tout au long du texte. Un roman tout en simplicité, mais la petite touche de magie (un arbre dont les pommes murissent en juillet au lendemain d'une nuit chaude entre deux amants, l'action ayant lieu sur une couverture à ses racines) permet au lecteur de s'évader dans un monde inconnu, presque un non-lieu.

Je me suis toujours dit qu'un roman qui soulève encore des questions après avoir lu le tout dernier mot est un livre qui en vaut la peine. Après ma lecture de ce roman, il me semble que je n'ai pas répondu à toutes les interrogations qu'il a soulevées, je pense donc que je devrai le relire! Ne serait-ce que pour goûter un peu plus longtemps à la compote de pommes de l'arbre centenaire, ou bien imaginer les tenues de soirées enfilées par Iris à maintes reprises dans le texte (ça c'est la petite princesse en moi qui parle!)

Un petit livre de poche qui se lit rapidement, sans qu'on ne se rende vraiment compte d'avoir lu près de 300 pages en un après midi paresseux et gris ...


vendredi 18 janvier 2013

En rafale...

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Comme je veux faire des critiques de livres que je n'ai pas encore lus, je me suis dit que certains seraient peut-être intéressés d'avoir quelques suggestions sur des romans que j'ai lus depuis un certain temps déjà!
Voici donc la liste de mes meilleurs lectures à ce jour! (même si j'en ai sûrement oublié quelques unes...) 
PS: Elles ne sont pas dans l'ordre de préférence.

- Le mec de la tombe d'à côté, Katarina Mazetti
- Novecento pianiste, Alessandro Baricco
- La servante écarlate, Margaret Atwood
- Lignes de faille, Nancy Huston
- Le vieil homme et la mer, Ernest Hemingway
- Carnets de naufrage et Chercher le vent, Guillaume Vigneault
- Rien ne s'oppose à la nuit, Delphine de Vigan
- L'histoire de l'amour, Nicole Krauss
- Doux-amer, Claire Martin
- Les hauts de Hurlevent, Emily Brontë
- Tu, mio, Erri de Luca
- Baisers de cinéma, Éric Fottorino
- Passion simple, Annie Ernaux
- Tout ce que j'aimais, Siri Hustvedt
- L'amant, Marguerite Duras
- Faire l'amour, Jean-Philippe Toussaint


La vérité sur l'affaire Harry Quebert - Joël Dicker



Ça faisait très (TRÈS) longtemps que je n’avais pas lu une brique (pour moi, un livre contenant plus de 350 pages est considéré comme beaucoup trop long habituellement!). Et très longtemps, aussi, que je n’avais pas littéralement dévoré un livre de la sorte. Malgré ses 667 pages, La vérité sur l’affaire Harry Quebert, roman écrit par Joël Dicker aux éditions de Fallois, m’a complètement captivé : je l’ai lu en trois jours seulement.

Dès les premières pages, nous sommes ramenés 33 ans en arrière lorsqu’une jeune fille de 15 ans, Nola Kellergan, disparaît en août 1975 dans la petite ville d’Aurora, au Massachusset. Cette histoire, que les habitants de la ville avaient presque oubliée, refait surface en 2008 lorsqu’on retrouve le squelette de Nola derrière la maison de l’écrivain célèbre et professeur d’université, Harry Quebert. On retrouve aussi le manuscrit encore lisible du roman Les origines du mal, plus grand succès littéraire de Quebert, dans le sac de cuir de la défunte jeune fille. Lorsqu’on arrête Harry Quebert, son mentor et plus grand ami, Marcus Goldman, écrivain en manque d’inspiration après le succès de son premier roman, décide de se rendre sur les lieux de crime. Si au départ Goldman ne voulait rester que quelques jours au Massachussets, le désir d’innocenter l’écrivain prend tout son temps et l’amène dans un tourbillon duquel il ne pourra sortir qu’une fois qu’il aura trouvé le véritable coupable de l’assassinat de Nola. 

Ce roman n’est pas tout à fait un roman policier. Oui, il s’agit d’une intrigue tissée à la manière des thrillers américains, mais ce qu’on lit, c’est aussi une réflexion sur l’amérique, la loi, et surtout l’authenticité. Un roman d’apprentissage aussi, car c’est au fil des 31 conseils d’Harry Quebert, donnés à Goldman quelques années plus tôt, que les chapitres se suivent de manière décroissante (de 31 à 1!) et permettent à l'écrivain Marcus Goldman d'écrire le roman que nous lisons, soit L'affaire Harry Quebert. Joël Dicker met en scène autant des personnages complexes que des stéréotypes (comme l'éditeur New Yorkais de Goldman ou alors sa mère qui n'a qu'un seul désir, celui de le voir marié), ce qui ajoute à la fois de la profondeur au texte et une touche d'humour.

Seul bémol (c'est d'ailleurs un peu le même que René Homier-Roy dans sa critique du 11 janvier) : la relation entre Nola et Harry, qui a inspiré ce dernier pour son roman Les origines du mal, est relatée (par la copie des lettres véritablement échangée en 1975 entre les 2 amoureux) de manière très simpliste et conventionnelle. On a l'impression qu'il s'agit d'une relation naïve et étrange, et je n'y ai pas vraiment cru. Bien sûr, lorsque la vérité sur l'affaire est révélée à la fin, on comprend un peu mieux l'effet que Dicker a voulu créer, mais il me semble que pour un livre considéré comme un classique de la littérature américaine dans le roman, Les origines du mal a tout à envier aux titres de Nicolas Sparks ou Marc Lévy!

Malgré cela, c'est le meilleur livre que j'ai lu depuis longtemps! Si vous êtes à la recherche d'un roman passionnant, extrêmement bien construit et contenant une réflexion intelligente sur la réalité de l'édition de best-sellers, courez vite vous procurer La vérité sur l'Affaire Harry Quebert

Pour terminer, voici un extrait qui m'a fait beaucoup rire en tant que future éditrice (et bouc émissaire d'auteurs!!)

"- Mon éditeur dit que si je n'écris pas un nouveau livre maintenant, je suis fini.
- Vous savez ce qu'est un éditeur? C'est un écrivain raté dont le papa avait suffisamment de fric pour qu'il puisse s'approprier le talent des autres." (p.31)

*La vérité sur l'Affaire Harry Quebert a remporté le Prix Goncourt des lycéens 2012 et le Grand prix de l'Académie française 2012.
 

jeudi 10 janvier 2013

L'enfant du jeudi - Alison Pick

L'enfant du jeudi - Alison Pick


Tout cela a commencé quand le grand-père de l'auteure (Pick sur l'afficheur!) a appelé à la librairie où je travaille pour réserver quelques exemplaires du livre L'enfant du jeudi de Alison Pick. Le livre n'était alors pas encore en librairie, mais n'allait pas tarder. Profitant d'un moment d'accalmie au magasin, je me permis une petite pause en lisant le résumé du roman sur le site de Boréal. Et voilà. Je devais lire ce livre!


D'abord parce que je considère avoir lu trop peu de livres sur l'holocauste. Ces récits, souvent très denses, remplis de détails et d'images horrifiantes, n'attirent pas vraiment mon attention. Mais quand même, le sujet m'intéresse et tous les romans qui portent sur un même sujet peuvent être écrits d'une multitude de façons.

L'enfant du jeudi raconte l'histoire de la famille Bauer (juifs non-pratiquants et très bien nantis) à travers les yeux de leur gouvernante, Martha, dans une petite ville de la Tchécoslovaquie, au début de la Seconde Guerre mondiale. Martha, jeune femme catholique d'origine vague et sans éducation, ne connaît pas grand chose du conflit qui est en train de se tramer en 1938 dans le territoire des Sudètes. Par ailleurs, elle sait qu'elle doit se ranger d'un côté (ce que lui répète son amant Ernst, l'associé nazi de M.Bauer) et elle se rend bien vite compte que sa véritable famille est celle de Pavel Bauer et sa femme Anneliese, et plus particulièrement leur fils Pepik, qu'elle a élevé comme une mère. Consciente des manigances d'Ernst qui, profitant de la situation de la déportation éventuelle de la famille Bauer dans les camps, s'empare de manière détournée de l'argent de son associé, Martha est honteuse et juge préférable de taire cette liaison qui risquerait de lui faire perdre à la fois son emploi et sa seule famille. La menace de l'occupation nazie devenue réelle, la famille décide de quitter pour Prague, pensant y être en sécurité. Entre la nouvelle fierté juive de Pavel et le désir d'Anneliese de sauver son fils (par n'importe quel moyen) se dresse Martha, qui avec une lucidité nouvelle, tente d'aider de son mieux Pepik à trouver un certain équilibre dans ce monde injustement discriminatoire. Et, toujours, cette image du train, à la fois rassurante et affolante, qui hante les personnages et l'autre narratrice, qui par ses recherches rend possible l'histoire racontée. Le train rassurant, c'est le "Kindertransport", dont on a rarement entendu parlé, qui a permis à des centaines d'enfants juifs de quitter leur pays pour éviter le pire, comme il en a été le cas pour Pepik dans le roman.

L'entrée dans le texte n'est pas facile. Un arbre généalogique sans branches. La description d'un train vu d'un oeil anonyme. Une lettre adressée à une anglaise. Une première intrusion de la narratrice, qui nous révèle d'entrée de jeu la fin dramatique du roman. Et enfin, nous arrivons en Tchécoslovaquie chez les Bauer, là où le récit commence vraiment. Cette multitude de points de vue aurait pu me décourager, mais à la lumière de certains éléments au fil du texte, je n'avais qu'à y revenir sommairement pour en comprendre les subtilités. Et l'insertion de lettres et de deux niveaux de récits rend le texte beaucoup plus vivant, même si il nous faut parfois recoller certains morceaux pour comprendre les éléments de l'histoire.

Alison Pick réussit à nous faire comprendre le raisonnement du peuple juif qui, malgré la menace, n'aurait jamais pu prévoir les atrocités qui l'attendait. Au quotidien, l'espoir peut être aussi bien un ennemi qu'un allié, qui dans le cas des Bauer les empêche de se sauver à temps, mais leur permet quand même de vivre en espérant un jour revoir leur fils.

Un roman qui m'a beaucoup appris d'un point de vue historique, mais qui m'a aussi fait réfléchir sur la manière de diversifier par l'écriture les visions d'une réalité connue et relatée maintes fois par le passé. Oui, il s'agit d'un drame. Mais jamais dans ce roman il n'est question de la réalité des camps et des atrocités dont on connait aujourd'hui les détails. L'atrocité, c'est aussi de savoir que tous les chemins (ou les trains) que nous prenons, même de manière réfléchie, peuvent nous conduire à notre propre perte. La beauté, c'est de ne pas être inerte, et d'avancer, coûte que coûte, par espoir ou par amour.